Gros plan sur les gâchettes fines et faciles

Les bons n’existent qu’en regard des méchants. Tout pendant le brouillon de l’Amérique, ils furent nombreux, les outlaws, à proposer aux honnêtes gens une réplique manichéenne digne de ce nom. Tiburce Oger et Hervé Richez ont trouvé hors des sentiers battus (dans les archives étasuniennes notamment), des desperados polymorphes de premier choix.
Un chœur de crayons western
Et de trois ! Tiburce Oger remet le cap à l’West. Après Go West Young Man et Indians, il a orchestré une troisième chevauchée chorale dans notre cher Vieil Ouest. Une nouvelle fois ce scénariste avisé – il considère avec raison que la réalité de la Conquête de l’Ouest dépassât souvent la fiction – a mobilisé des crayons western pour mettre en bandes dessinées une douzaine de récits captivants directement inspirés par la réalité historique. » Gunmen of the West retrace les destins authentiques et méconnus de hors la loi de l’Ouest américain de 1780 à 1920. Aventuriers, tueurs en série, filles de saloon, esclaves en fuite et amérindiens « hostiles » forment cette mosaïque sans pitié, bien souvent éloignée du mythe hollywoodien« . Plaisant et instructif.
La fascination pour le Nouveau Monde
La magie de l’Ouest opère encore et toujours… Sur les grands espaces américains, sublimes et farouches, hérissés de pics et canyons, souffle le vent de la liberté. Les pionniers qui ont forgé le Nouveau Monde à grands coups d’héroïsme et de lâcheté étaient, comment eut-il pu en être autrement, des femmes et des hommes tour à tour ordinaires et extraordinaires. Des aventuriers, qui n’avaient rien à perdre donc tout à gagner au risque d’y laisser leur peau, ont écrit une saga, en mode Histoire ou légende, qui fascine le rebelle qui sommeille aux tréfonds de chacun de nous autres bédéphiles embourgeoisés. Lesquels se demandent si plus ou moins deux cents ans plus tard on n’a pas gagné en civilisation ce que l’on a perdu en liberté. On ne peut bien sûr pas regretter ces temps sauvages où régnaient les lois de la violence et de l’injustice. Mais on peut déplorer de vivre dans un monde où il y a toujours plus de lois et toujours moins de liberté. On ne compte plus les interdits, les contraintes, les normes continentales, la dictature des minoritaires, les amandes… Et pire, le politiquement correct, la police de la pensée, la censure de l’art et de l’humour.
La nostalgie d’une liberté presque absolue
Sans doute est-ce pour ces raisons que nous sommes toujours aussi nombreux à chercher dans le Western Spirit un paradis, sinon perdu, fantasmé. À l’évidence les BD, les films, les livres western n’ont jamais été aussi nécessaires.
D’ordinaire, mon critère numéro 1 pour estimer le neuvième art, c’est le dessin. Avec les œuvres chorales, on est amené à se frotter à des styles que l’on ne fréquente pas spontanément, et c’est heureux car ainsi on découvre d’autres talents… Dans cet album j’ai particulièrement apprécié Paul Gastine, Félix Meynet, Eric Heringuel, Christian Rossi, Olivier Vatine, Jef et Nicolas Dumontheuil…
GunMen of the west chez Grand Angle (disponible également en édition luxe grand format) est en librairie depuis le 15 novembre 2023.
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