Jeremiah Johnson, la BD
Tous les fans de western ont fait la connaissance de Jeremiah Johnson dans le film éponyme de Sydney Pollack en 1972. Cette incarnation cinématographique du trappeur avait alors les traits de Robert Redford. Ce long métrage porté par un souffle épique était tout à la fois une ode au courage des moutain men et à la beauté de la nature indomptable. Je crois même que certains y ont vu un film « écologique ». Toujours est-il qu’il rencontra tout à la fois l’assentiment du public, des critiques et des fans de western. Carton plein ! Un succès amplement mérité. Incontournable.
En 2020, Fred Duval et Jean-Pierre Pécau (scénario) et Jack Jadson (dessin) ont adapté cette légende de l’Ouest en bandes dessinées.
Rappelons l’histoire largement inspirée de la vie d’un personnage réel : Joe Johnson.…
Un soldat démobilisé, lassé de la (relative) civilisation de son temps et de la folie des hommes, décide de prendre du champ. Il entend devenir trappeur et « épouser » la solitude sublime des Rocheuses. Il va vite se rendre compte qu’il ne suffit pas de vouloir pour pouvoir… vivre comme un ours quand on n’est qu’un homme. Mais son ange gardien veille et le met en présence d’un chasseur de grizzly qui le prend sous son aile et lui transmet les règles de la subsistance en milieu farouche. Une fois initié, il quitte son mentor, rencontre des Indiens, noue des amitiés, recueille un garçon muet, épouse une Tête-Plate baptisée Cygne, cherche et trouve un lieu (magnifique) pour installer sa petite famille et vivre heureux… Pas de quoi faire un chef-d’œuvre !
En effet, Tolstoï l’a dit : « les gens heureux n’ont pas d’histoire ».
Sous-entendu, ils n’intéressent personne. Le public (et les médias) se repaissent de guerres, de drames, de catastrophes, de faillites, de divorces, d’accidents, de bagarres… Ils raffolent de gamelles en tous genres. Le cas échéant, quand l’actualité manque d’imagination, ils en inventent. Il leur faut leur dose de sang, de sueur, de larmes. Et de morts. Voilà pourquoi les écrivains et les scénaristes, tout comme la vraie vie, plongent leurs personnages, les femmes et les hommes qui sortent du rang notamment, dans les ennuis. Les histoires à succès marchent au super malheur pas au diesel bonheur. Et de ce point de vue Jeremiah Johnson sera servi… De retour d’une mission, il retrouve les siens abominablement massacrés. Dès lors, il n’aura de cesse de les venger. Le déchaînement de sauvagerie atteindra un paroxysme rarement atteint. On l’appellera le tueur de Crows, le mangeur de foies… Bon vous l’avez compris… Nous ne sommes pas dans une bluette pour sainte-nitouche. Nous ne sommes pas non plus dans un registre politiquement correct ou édulcoré par on ne sait quelle autocensure. Nous sommes dans une magnifique BD dans laquelle le scénario et les dessins se conjuguent idéalement pour réjouir les amoureux de l’Amérique.
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Jeremiah Johnson par Duval, Pécau, Jadson et Sayago (colorisation) chez Soleil, 60 pages, 15 €
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